Quand c'est écrit avec la typo Arial, celle-ci maintenant oui, c'est écrit par la main de Mélanie. Mélanie A. en 1989.
Quand c'est écrit avec la typo Times, c'est par ma main, Alice B., en 1989.
C'est visuel. La typo arial ressemble plus physiquement à son écriture manuscrite, grosse et ronde, et la times à la mienne, fine et effilée.
Alors pourquoi aujourd'hui en 2024, j'écris moi Alice B. avec la même typo que celle choisie pour retranscrire l'écriture de Mélanie de 1989 ? Parce que c'est ma typo préférée et que c'est celle que j'ai choisie pour ce blog aussi.
Au début on écrivait ensemble, on cherchait les phrases à voix haute et c'était l'une ou l'autre qui retranscrivait ou qui faisait l'effort de faire des phrases correctes je crois.
On était assises par terre sur la moquette gris-bleu de ma chambre à attendre pas trop convaincue (moi) que l'inspiration tombe sur la mollassonnerie.
Assez vite c'est surtout toi qui l'écrivais le gravillon, d'ailleurs c'était encore une idée à toi, frénétiquement et mal fichument mise en oeuvre. Moi ce que je voulais c'était faire des super illustrations, des super typos pour les titres, une super couverture mais tu faisais tout hyper vite chez toi, après c'était fait, je disais rien.
On écrivait dans un vieil* agenda non utilisé que t'avais chopé chez ton grand-père ou dans ton sous-sol, c'était moche mais ça ressemblait à un livre avec une couverture un peu rigide en skaï bleu marine. T'avais pas pu t'empêcher de le recouvrir de papier pas terrible, du papier à lignes de feuille de classeur où t'avais écrit le titre à mes yeux n'importe comment avec un sens graphique nul et dessiné des espèces de petites fleurs qui n'avaient aucun rapport avec l'histoire. Enfin bon et le tout recouvert de vieux plastique transparent déjà utilisé mal scotché et agrafé aussi, non mais allô.
Même maintenant cette couv me désespère.
Me désole, me fout le cafard. Mais peut-être qu'à force de la regarder je vais changer d'avis.
Sa totale nullité artistique m'empêche de la prendre en photo, là c'est l'intérieur que je vous montre. Vous voyez. C'est exactement le même emballage sachets plastiques/scotch dont je parlais ici.
Ce livre on le planquait dans ma chambre, dans le grand tiroir en bois hyper chiant à ouvrir, on le mettait tout au fond dans le coin gauche, sous une pile de trucs dont "La mode de Monique en 4 saisons". Lui j'aimerais bien remettre la main dessus, il cartonnerait en 2023, attendez je vous explique. Monique c'était qui, c'était Monique Buchou, notre surveillante de car, le car pour aller au collège. Elle passait son temps à crier. On l'aimait pas, on la trouvait bête et moche, elle parlait mal, elle disait pas de genoux, j'ai dit pas de genoux ce qui voulait dire ne vous mettez pas à genoux sur vos sièges. Le chauffeur c'était un pépé qui mettait le clignotant une fois sur deux, M. Gravier, le danger public, mais bon c'était ok il roulait pas vite et il disait rien contrairement au conducteur du car de La Barre de Monts qui était alcoolique et terrorisait tout le monde en hurlant des trucs en polonais (désolée, c'est la vérité, enfin je crois, c'est ma grande soeur qui racontait ça à peu près, ok je m'en souviens mal, mais je lui demanderai et si jamais je me suis plantée je viendrai rétablir la vérité, la vérité de ma soeur, si elle se souvient encore de ce que lui racontaient ses potes qui prenaient ce car, parce que ici c'est ok, c'est pas imprimé, je vais bien faire ce que je veux).
Donc Monique elle nous pourrissait tellement les voyages que pour rigoler (attention ça va être très drôle) on imaginait une histoire d'amour secrète entre elle et M. Gravier, le chauffeur pépé. Moi la reine de l'illustration j'avais dessiné toutes ses tenues façon book de styliste (hum) parce qu'elle avait une collection de pulls à motifs qu'on trouvait ignobles mais qui depuis quinze ans cartonnent dans les friperies de riches et rendent extatiques les jeunes gens artistes qui aiment par dessus tout le mauve le noir et le gris argenté. La mode de Monique en 4 saisons c'était notre trésor secret, la meilleure blague de l'année.